Politique : peur ou certitude d’être trompés… ?
Selon les baromètres régulièrement publiés, moins de 10% de nos compatriotes feraient confiance aux partis politiques, environ 20% aux médias et plus désastreusement, 40% seulement à leur justice…
Lorsqu’on leur parle de politique, pour un tiers des citoyens interrogés, elle évoque du dégout et pour près de la moitié d’entre eux, de la méfiance ?
Dans le paysage des élus, seuls les Maires recueillent 60% de cote de confiance… et fort honorablement, l’Hôpital, l’Armée et la Police s’en sortent en dépassant les 70% de crédit.
Dans le domaine de la santé, à en croire un sondage récent, un Français sur deux n’aurait pas confiance en la vaccination pour échapper à la contamination par la COVID 19 !
Ces scores qui nous placent en queue du peloton Européen des « confiants au politique », seraient dus, d’après des commentateurs doctes, borgnes, simplistes et/ou peu scrupuleux, à notre tempérament capricieux de « sous-citoyens » (cela a été écrit), à notre excessive exigence vis-à-vis de l’état, ou encore, à notre arrogance… ?
C’est à mon sens trop facile de balayer ainsi ce sujet d’un revers de poignet dédaigneux, de clouer de la sorte notre peuple au pilori, lui attribuant des tares congénitales rédhibitoires qu’il serait seul à connaître, indépendamment de toutes formes de conduites de ses élites et de sa si singulière gent politique, lesquelles, pourquoi non, pourraient bien être, en toute logique, à l’origine de cette surprenante suspicion nationale.
Et si, tout simplement, nous étions moins naïfs, moins candides, moins séraphique que bien d’autres populations… si nous disposions intuitivement d’une vision plus juste de la nature de l’HOMME (au sens anthropologique du terme) et de l’incommensurabilité de sa capacité à « enfumer », duper et mystifier naturellement ses semblables, a fortiori lorsqu’il détient légitimement ou illégitimement un pouvoir ?
NON, résolument NON, je ne peux croire au gène du soupçon, dont on voudrait absolument que nous Français, soyons congénitalement porteurs !
A mon sens, il convient de chercher ailleurs les fondements de nos doutes…
J’oserai les situer dans la communication souvent absconse, les incessants défauts d’exemplarité, l’incompétence de gestion, les innombrables incohérences, les multiples promesses électorales non tenues, les erreurs monumentales de stratégie, l’irresponsabilité coupable… émanant du premier cercle de nos politiciens, le plus en lumière.
Sur la communication ?
C’est en écoutant Jean CASTEX et ses Ministres s’exprimer sur l’évolution de la crise sanitaire que me vint le besoin d’écrire ces lignes…
Comment, dans l’exercice d’une conférence de presse, peut-on en effet, lorsqu’on dirige l’exécutif de la France du 21ème siècle, à l’heure du « twit » planétaire, être aussi peu concis, aussi peu intelligible, autant ampoulé, verbeux et déclamatoire…
Comment est-il possible, avec la gravité du fond, de se montrer en la forme, si décalé, si démodé, si loin de la réalité et du verbe courant des Français ?
Comment imaginer pouvoir convaincre des adolescents, des lycéens, des apprentis, des étudiants, de jeunes cadres et entrepreneurs… tous aujourd’hui « branchés »… avec des discours aux consonances de 4ème république, des incantations « Malrauxesques » et la dégaine d’un notable du 19ème siècle ?
Ce considérable décalage, entre la posture, le discours politique contemporain, et la configuration, la programmation de l’oreille et des cellules grises populaires, est sans aucun doute, l’une des raisons, si ce n’est la principale, de la méfiance et/ou de la défiance du citoyen lambda vis-à-vis de la classe politique, laquelle lui ressemble tellement peu, même si, avec Edouard PHILIPPE, on s’en était plutôt rapproché.
Pour convaincre et persuader dans l’opérationnel, il faut être a minima compris par la multitude et s’en assurer, donc se situer sur son terrain, au même niveau et parler le même langage !
Tout ce qui brille n’éclaire pas nécessairement !
Sur l’exemplarité ?
Même si la quasi-unanimité des personnels politiques, à quelques niveaux qu’ils soient perchés, est incontestablement intègre, l’absence éclatante d’exemplarité de quelques-uns, leur déloyauté, leur cupidité, leur infidélité, leurs petits ou grands accommodements avec la vérité, leurs compromissions, leurs tricheries, leur avidité, leur incrustation poisseuse dans le système… les a placés et les place encore et toujours, en partie émergé de l’iceberg, l’un chassant l’autre, laissant aisément à penser au corps social, par réflexe spontané classique de généralisation, que l’ensemble est « pourri ».
« L’exemplarité et la confiance sont indissociables. L’absence de l’une entraine l’inexistence de l’autre. » Patrick-Louis RICHARD.
Sur la compétence ?
Assurément, nos élites politiques et nos hauts fonctionnaires d’état, sont formés, programmés, formatés et revêtus de magistrales « peaux d’âne » ! Nul ne parierait a priori sur leur incompétence. Pour la majorité d’entre eux cependant, ils n’ont jamais côtoyé le terrain, mis les mains dans le cambouis, géré une entreprise, ni rempli les innombrables formulaires vomis par leurs administrations technocratiques.
Pour rester séant, je dirais seulement qu’ils constituent une caste, volontiers népotiste, qui se préconise, s’auto-recrute, s’auto-congratule. Cette tribu a fait métier de diriger et conduire, soit idéologiquement, soit opérationnellement, les systèmes qui constituent, irriguent et animent la Nation.
Incontestablement les problématiques auxquelles ils ont à faire face sont complexes, interférentes, verticales et transversales, nationales, internationales ou planétaires et pour paraphraser le Général de Gaulle, ce doit être une bien étrange entreprise que celle de devoir gouverner un pays où il existe 25 variétés de fromages.
D’évidence, tout ne peut y être dit ; tout ne peut y être montré ; tout ne peut y être expliqué. La Gouvernance du pays n’est donc comprise qu’à l’aune de ce que chacun déchiffre, interprète et observe dans son immédiat environnement.
Y décelant, sans beaucoup chercher, des incohérences (telles la fermeture des librairies et du petit commerce au long de ce second confinement), des gaspillages de deniers publics associés à des taxations surmultipliées, des administrations surpeuplées jumelées à des services sous-délivrés, des cafouillages décisionnels à répétions, des erreurs de psychologie politique élémentaire, des fautes de langage… et pire, l’incapacité à faire régner l’ordre, la sécurité et préserver l’intégrité du territoire, chaque Français censé se prend à imaginer qu’avec son CAP, son BAC… ou simplement son expérience, il ne ferait pas pire… quant aux chefs d’entreprises, ils savent pertinemment que leurs sociétés seraient en faillite s’il les géraient de la sorte…
Sur l’incohérence ?
Comment un quidam moyen peut-il raisonnablement comprendre…
- Que leurs élus aient assassiné pendant des décennies le petit commerce en vidant les centres-villes au profit de la grande distribution et qu’ils tournent brusquement casaque pendant le confinement ?
- Que la politique nationale de rigueur et d’économies se soit soudainement transformée en un déluge d’euros « quoi qu’il en coûte » ?
- Que l’on cherche à taxer les GAFA, concurrents déloyaux, tout en favorisant par la fermeture des librairies, le business du livre chez AMAZON ?
- Que l’on ait ravalé l’hôpital public au rang d’industrie capitaliste, sans se soucier des conséquences possibles de sa paupérisation face à l’éventualité d’une crise sanitaire sévère ?
- Qu’en dépit d’une surpopulation de technocrates et de bureaucrates, on ait pu vivre le scandale des masques périmés ?
- Que dans l’affaire de l’aéroport de Notre-Dame des Landes de sinistre mémoire, on ait assisté à un tel déni de démocratie, de justice, ainsi qu’à ce tragique renoncement de l’État ?
Sur les multiples promesses électorales non tenues, les erreurs monumentales de stratégie, l’irresponsabilité coupable…
Tout citoyen un tant soit peu éclairé a pu mesurer l’ampleur de la démagogie électorale de « lui président » (l’inénarrable incantation à l’inversion de la courbe du chômage ???), apprécier en 1997 l’inattendue stupide dissolution de l’Assemblée Nationale ayant entraîné la plus longue cohabitation de l’histoire de France, ainsi que la suppression sans substitut du Service Militaire, décision probablement à l’origine de la désagrégation de la Nation, assister en 1998 à l’effondrement de la valeur « travail » en conséquence de la loi dite AUBRY sur les 35 heures, constater la dilapidation de multiples fleurons de l’industrie française (Alcatel-Lucent, Alstom, Lafarge, Technip…) et leurs gâchis sociaux, déplorer la fracture territoriale et sociale (70% des usines sont installées à proximité de villes petites et moyennes et une grande partie du territoire reste en déshérence) ferment incontestable du mouvement dit « des gilets jaunes », observer désespérément l’échec du fret par le rail, du ferroutage, ainsi que l’abandon catastrophique des réseaux ferroviaires secondaires, créateurs et accélérateurs de flux routiers accidentogène insupportables, ainsi que de pollution, écouter ces innombrables discours lénifiants à destination des Agriculteurs, des Artisans et des Commerçants de France, immédiatement suivis des pires trahisons…
La liste pourrait en être très longue… par décence, je m’en arrêterais là…
Les Français méfiants, défiants… ?
Non, décidément Non ; simplement un peuple sensé, averti, avisé, prudent, vigilant, lucide, responsable… face à l’imagination et à la créativité débordantes d’un personnel politique et de ses suppôts, toujours plus exigeants vis-à-vis des citoyens que d’eux-mêmes, plus enclins à consommer de la valeur qu’à en produire… et surtout… plus prompts et sujets à parler surabondamment plutôt qu’à agir.
A juste titre, selon l’adage populaire « chat échaudé craint l’eau froide » !