GLORIA COOPERANTE…! Chapitres 1 et 2

By 16 janvier 2019 Coopératives

GLORIA COOPERANTE… !

Janvier 2019

Avant-propos

Noyé dans ce que les technocrates ont dénommé, sous l’ère « Jospinienne », « L’économie Sociale et Solidaire » (E.S.S), le Modèle Coopératif offre aujourd’hui aux entreprises innovantes et progressistes, des préceptes, des valeurs, des modes de réflexion et d’action qui, à mon sens, correspondent et répondent idéalement aux aspirations profondes de nos contemporains concitoyens.

Face à la déliquescence des valeurs humanistes, qui jour après jour, gagne la plupart des nations dites « civilisées » sur notre planète, le « Faire Ensemble » a, plus que jamais du sens… et le vent en poupe !

Le monde Coopératif se situe en effet, en raison de son statut particulier, dans le « tiers secteur », entre étatisation et capitalisme, c’est-à-dire, entre la loi du marché qui prône exclusivement l’efficacité économique et l’intervention publique, garante de la justice sociale.

Fondé sur l’Égalité des Associés Coopérateurs, la Mutualisation des ressources (humaines – technologiques et techniques – financières – logistiques – matérielles et immatérielles…), la Solidarité intergénérationnelle, la Citoyenneté territoriale et la Responsabilité entrepreneuriale et Sociétale, c’est, me semble-t-il, une manifestation remarquable de l’imbrication de l’économique et du social, qui propose notamment un mode différent de gestion et de répartition du pouvoir.

Pour plagier Winston CHURCHILL dans son appréciation de la démocratie, je n’hésiterais pas à assurer que « La Coopération est le pire des systèmes, à l’exclusion de tous les autres… ».

 

I

Un peu d’histoire ne gâte rien…

Du haut de cet « édifice » économico-social singulier et discret, 9 siècles nous contemplent…

Excusez du peu… !

Initié en France en 1273[1] ce spécimen d’entreprise mutualiste procure de nos jours, dans le monde, les moyens d’existence de 3 milliards de personnes qui en dépendent directement[2].

« La coopération n’est pas un fait isolé, limité à quelques pays, c’est un mouvement mondial important. Les coopératives sont présentes partout dans le monde, sur tous les continents. Les 300 premières coopératives mondiales affichent un chiffre d’affaires égal à l’économie de la 9ème économie mondiale. Les Nations Unies[3] estiment que la vie de la moitié de la population de la planète dépend significativement des entreprises Coopératives[4] »

L’Europe comptait en 2015 près de 180.000 entreprises coopératives, regroupant plus de 140 millions d’Associés Coopérateurs (plus de 17% de la population – 1 personne sur 5), employant 4,5 millions de salariés et développant un chiffre d’affaires de l’ordre de 1.000 milliards d’euros. Depuis 2009, les nombre d’entreprises de ce type en Europe a augmenté de 12% et ses membres de 14%.

En France, 2ème économie Coopérative au monde et leader Coopératif en Europe, on comptait à la même date, 21.000 entreprises Coopératives, réunissant plus de 26 millions d’adhérents (40% de la population française est membre d’une Coopérative), employant 1,2 million de salariés et réalisant 307 milliards d’euros de chiffre d’affaires, devant l’Allemagne (195 M€), l’Italie (150 M€) et les Pays-Bas (81 M€).

10 Coopératives françaises font partie du Top 30 des grandes coopératives européennes.[5]

On trouve ces entreprises collectives[6] dans tous les secteurs d’activité[7] : l’industrie et les services (61.964 entreprises Coopératives, soit 36%), l’agriculture avec plus de 30% (51.392 entreprises) et le logement avec plus de 22% (37.570 entreprises).

La banque est le secteur le plus important en termes de sociétaires, avec plus de 43% du total des membres de Coopératives en Europe (soit près de 65 millions). Viennent ensuite la consommation avec près de 27% (plus de 37 millions de membres) et l’assurance avec plus de 12% (presque 17 millions de membres).

Ce sont les secteurs de l’industrie et des services qui rassemblent le plus de salariés avec plus de 27% (1,4 millions), suivis par le commerce avec près de 24% (1,1 million) et la banque avec près de 19% (0.9 million).

L’agriculture est le secteur le plus important en termes de chiffre d’affaires (39% – 347 millions d’euros), suivie du commerce avec près de 30% (264 millions d’euros) et la consommation avec près de 12% (103 millions d’euros).

Sans le savoir, au quotidien, nous côtoyons et fréquentons un nombre incalculable d’institutions, de T.P.E / P.M.E / P.M.I[8], de magasins, de comptoirs, de prestataires Coopératifs, qui n’affichent malheureusement pas leur appartenance au modèle, comme s’il s’agissait d’une « tache » honteuse, ou comme si celui-ci ne les différenciait[9] stratégiquement pas des autres opérateurs sur leurs marchés…

En France, les Coopératives concernent notamment 70% de l’activité banque de détail, 40% de l’agro-alimentaire et 30% du commerce de détail.

On y recense…

  • Dans le secteur du Commerce
    • Les 3 réseaux indépendants de Distribution Alimentaire (Leclerc – Intermarché – Système U), des Distributeurs de produits Bio (Biocoop…), des Opticiens (Optic 2000 – Atol – La Guilde des Lunettiers – Krys…), des Distributeurs d’Agroéquipements (Promodis – SCAR…), des Distributeurs de produits Pharmaceutiques (Astera – Welcoop – Giropharm…), des Distributeurs d’articles de Sport (Intersport – Sport 2000…), des Distributeurs d’outils et de matériel de Bricolage (Bigmat – Weldom – GEDIMAT…), des Distributeurs de produits d’équipement de la Maison (SCM…), des Distributeurs de fournitures Scolaires (SADEL – NLU – LIRA – LAFOLYE…), des Distributeurs de végétaux et équipements pour le Jardin, le Plein Air et la décoration de la Maison (GAMM VERT-Jardiland – POINT VERT…), des distributeurs de Jouets (JouéClub…), des distributeurs de produits pour Bébés (France Maternité-Bébé 9…)…
  • Dans le secteur Bancaire
    • Le Crédit Agricole – Le Crédit Coopératif – Le Crédit Mutuel – La Caisse d’Épargne – Les Banques Populaires….
  • Dans le secteur de la Prestation de Services
    • Des agences immobilières (ORPI – L’Adresse…).
    • Des sociétés H.L.M…
    • Des sociétés de Taxis (Gescop Alpha – Olvo…).
    • Des centres de contrôle technique automobiles (Autosécuritas A3S…).
    • Des agences de voyage (Selectour…).
    • Des entreprises de services à la personne (CoopChezVous – Hexa Coop – Interservices…) …
    • Des hôteliers (P’tit Dej-Hôtel – Inter-Hôtel – Qualys-Hotel – SEH…) …
  • Dans le secteur de l’Artisanat
    • Des Bouchers (COBO Sud), des Poissonniers (SCAPP), des Electriciens, Plombiers, Chauffagistes (VST – COVAP – LIGARTIS – Gif – Axenergie – GASEL…), des Plaquistes, Couvreurs, Charpentiers, Menuisiers, Agenceurs (UAB – SCABOIS – TRIANGLE 37…), des Maçons, Plâtriers, Carreleurs (LMCR), des Couturiers (La Goutte d’or), des Garagistes (CAPAIL), des Paysagistes (SAP), des Constructeurs immobiliers (ACT – CMI – CABG…) …
  • Dans les secteurs de l’Agriculture, Viticulture, Maraîchage, Arboriculture
    • Des exploitants réunis pour les ¾ d’entre-eux, en France, au sein de près de 400 entreprises (plus de 2300 TPE/PME – 149 entreprises de taille intermédiaire) et 12.260 CUMA (Coopératives d’Utilisation de Matériel Agricole)[10].

Parmi les 13 grands groupes Coopératifs Français, 6 pour l’agriculture se classent dans le top 20 européen et 3 dans le top 20 mondial.

Dans le top 100 français[11] des Groupes Coopératifs, on recensera principalement pour l’agriculture, la viticulture, le maraîchage et l’arboriculture…

  • In Vivo – Terrena – Agrial – Sodiaal – Tereos – Vivescia – Axéréal – Cristal Union – Actura – Even – Cooperl – Triskalia-d’Aucy – Limagrain – Les Maîtres Laitiers – Maïsadour – Euralis – Lur Berri – Advitam – Cap Seine – Cavac – Scael – Arterris – Sica Saint Pol – Océalia – Terre du Sud – Terre Atlantique – Noriap – Sicarev – Emc2 – Le Gouessant – Terra Lacta – Aveltis – Acolyance – Vivadour – Dijon Céréales – La Dauphinoise – Unicor – Cam 53 – Lorca – Comptoir Agricole Hochfelden – Urcoopa – Cal 54 – Capel la Quercynoise – Agora – Centre Ouest Céréales – Valfrance – Bourgogne du Sud – Val de Gascogne – Le Centre Viticole – La CRVC – Le Groupe Alliance – Océanne – Savéol – Pomanjou – Sicoly…

De la même façon, achetons-nous et consommons-nous régulièrement, en toute opacité et donc ignorance, des produits de Marques issus de Coopération.

Parmi celle-ci, citons pour exemples…

  • CANDIA – BEGHIN-SAY – VILMORIN – CLAUSE – LABEYRIE – Jean STALAVEN – KOKI – YOPLAIT – Maître PRUNILLE – Nicolas FEUILLATTE – BANETTE – REGILAIT – SAVEOL – AGRILAIT – YOP – Le JANZÉ – BUZET – Le LOUÉ – PERLIM – DELPEYRAT – JACQUART – RICHEMONT – CŒUR DE LION – PAYSAN BRETON – Les Halles de l’Aveyron – BROCÉLIANDE – PANNIER – MONTAUDON – LE BRUN DE NEUVILLE – Veuve A. DEVAUX – PALMER…

 

II

Un modèle d’entreprise fondé sur des Valeurs Humanistes

Une Coopérative c’est d’abord une société « Humaine » avant d’être une société de capitaux[12] !

Faut-il, dès cet énoncé, rappeler que l’entreprise mutualiste est de ce fait, un édifice toujours fragile, puisque précisément elle repose sur « l’individu » dont l’inconstance atavique n’est plus à démontrer.

En toute logique, les Coopératives se sont donc toujours mieux développées dans les périodes de grandes difficultés ou le besoin de solidarité s’exprime naturellement[13], qu’en périodes de « vaches grasses » ou les attitudes et comportements individualistes, autonomistes, élitistes, voire sécessionnistes ressurgissent « au galop ».

Imaginées pour gagner en compétitivité, maximaliser du producteur au client, la valeur créée, et se la partager équitablement, leurs fondateurs, pour réussir ce noble dessein, ont très naturellement revendiqué leur liberté[14], leur indépendance[15], leur autonomie[16] !

Cohérents, ils se sont imposés pour régir ce nouveau mode entrepreneurial, des préceptes exigeants, des règles singulières de fonctionnement et de gouvernance, scrupuleusement fondées sur des principes respectueux de la « personne » …

  • La démocratie[17] qui permet aux Associés Coopérateurs, à travers l’Assemblée Générale (ordinaire ou extraordinaire)[18], de détenir tout pouvoir.

Ils élisent en son sein leurs légitimes représentants, qui forment un Conseil d’Administration, dont le Président ne peut se prévaloir que des seuls pouvoirs qu’il lui confère, le Conseil, lui-même, étant audité, contrôlé et sanctionné[19] par la base lors des A.G.

  • L’égalité qui garantit à chacun des Associés Coopérateurs, sans aucune distinction économico-sociale, une seule et même voix pour toutes les prises de décisions.
  • La solidarité qui s’exerce principalement à deux niveaux, d’abord par l’appel au respect des engagements : le sacro-saint devoir de « fidélité»[20], ensuite intergénérationnellement, par la transmission au long cours, d’un patrimoine matériel et immatériel souhaité initialement et voulu légalement impartageable.
  • La proximité qui ne doit pas nécessairement se traduire par le seul voisinage « physique » (même si cet aspect n’est pas à négliger dans certains secteurs d’activité, pour de banales, mais vitales, raisons logistiques), mais bien davantage par une profonde, permanente et indéfectible intimité catégorielle, culturelle, professionnelle (connaissance, compréhension, prise en compte et traitement des attentes, des besoins, des problématiques, des difficultés « métier », de tous les Associés Coopérateurs…).

L’entreprise Coopérative, par nature non opéable et ancrée localement, constitue en outre, un levier non négligeable du développement des territoires sur lesquels elle est implantée, non seulement en terme création d’emplois directs et indirects, mais le plus souvent par le maintien d’une animation économico-sociale dans la ruralité.

  • La responsabilité du collectif qui incombe à chacun de ses membres, notamment par son implication et l’assiduité de sa participation à la vie de la maison commune, mais aussi par la fiabilité de son engagement (le respect de sa signature), par la qualité de sa production et surtout par l’image de « l’institution » et du modèle, qu’il offre, porte diffuse et projette personnellement ou par entreprise interposée, aux yeux des tiers.
  • La transparence qui permet à tout Associé Coopérateur, soit directement lors de réunions (de sections ou de secteurs selon les « métiers »), soit au moment de l’A.G, soit par ses Élus interposés, d’avoir accès à toutes les informations, toutes les données sociales, économiques, comptables et de gestion, ayant induit les décisions de la Gouvernance et traduisant la performance qualitative et quantitative des différentes activités ou systèmes de la Coopérative.
  • La pérennité qui permet aux générations nouvelles d’Associés Coopérateurs, de bénéficier instantanément, dès leur engagement signé, sans bourse délier[21], de l’ensemble des moyens de l’entreprise Coopérative : son capital immatériel de compétences humaines verticales et transversales, ses fonds propres cumulés (capital + réserves légales et spéciales), ses outils de production et/ou de distribution, ses méthodes et équipements logistiques et/ou commerciaux, ses systèmes de veille, d’information et de gestion, ses réseaux amont et aval, la valeur incorporelle des marques qu’elle a créées, le tout lucidement, patiemment, courageusement, parcimonieusement, respectueusement et généreusement accumulé par les générations précédentes[22] qui se sont succédées depuis l’origine de l’entreprise.
  • Le service au sens le plus large, dispensé professionnellement à tous les niveaux (veille, recherche & développement, sourcing, référencement, approvisionnement, achat, stockage, transformation, transport, conseil technique, accompagnement commercial, assistance administrative et à la gestion, substitution dans certaines opérations de production ou de transformation…), dans l’intérêt de l’ensemble des Associés Coopérateurs, pour satisfaire leurs besoins économiques et sociaux.

En synthèse, la Coopérative réalise pour l’Associé Coopérateur, ce qu’il ne veut pas, ne sait pas, ou ne peut pas faire lui-même ou seul.

Elle est le prolongement de fait de sa propre affaire : c’est réellement sa seconde entreprise !

Comment donc, naturellement et spontanément, ne pas avoir l’envie ou l’audace, ici et maintenant, de rapprocher la Coopération et ses valeurs vertueuses différenciantes énoncées ci-avant, de la manifestation de plus en plus audible et pressante, des attentes, des aspirations, voire des rêves de nos compatriotes contemporains ?

Que souhaitent-t-ils donc, que clament-t-il donc, que revendiquent-t-ils donc ?

Pour l’essentiel…

  • Plus de Justice Sociale (plus d’équité catégorielle… ou de classe).
  • Plus de Démocratie (un retour à la voix et à la volonté du peuple).
  • Plus de Transparence (savoir « surtout » et « sur tout », la vérité).
  • Plus de Sécurité (pour se protéger entre autres maux… du chômage, de la maladie, de la malveillance, de la vieillesse, de la dépendance…).
  • Plus d’Authenticité et d’Équilibre entre l’homme et la nature (pour respecter leur planète, pérenniser ses ressources et mieux y vivre…).
  • Plus de Responsabilité, de Citoyenneté et de Collaboratif (pour être réellement les acteurs de leur devenir…).

A l’évidence, la concordance entre l’offre « idéologique » de la Coopération et la demande présente des Peuples, d’un retour aux valeurs sociétales humanistes, est presque parfaite !

Seules donc l’hyper-discrétion coupable des institutions et acteurs du secteur Coopératif, de dangereuses déviances du modèle, ou une volonté politicienne délibérée de mettre un terme à son expansion, pourraient freiner son développement mondial.

§ § §

[1] Les fruitières de Comté dans le Jura (Mise en commun de production de lait et attribution des meules au prorata des apports…).

[2] Source ONU.

[3] L’ONU a déclaré l’année 2012 « Année des Coopératives ».

[4] Extrait du site Coop.fr

[5] Source Coop.Fr

[6] Et non collectivistes.

[7] Statistiques européennes.

[8] T.P.E => Toute Petite Entreprise – P.M.E => Petite et Moyenne Entreprise – P.M.I => Petite et Moyenne Industrie…

[9] Au sens marketing.

[10] Source Coop de France.

[11] Chiffres 2018.

[12] Même si Coopérer ce n’est ni renoncer au profit, ni à la capitalisation.

[13] Ne dénommait-on-pas les Coopératives Agricoles « Filles de la misère » …

[14] La liberté se définit comme l’état d’une personne libre, non contrainte ayant la possibilité d’agir selon ses propres choix et sans être liée par un engagement.

[15] L’indépendance se présente comme l’état d’un système qui ne dépend que de lui-même.

[16] L’autonomie est la faculté d’agir par soi-même en se donnant ses propres règles de conduite, sa propre loi.

[17] Cf. la formule d’Abraham Lincoln : la démocratie est « le gouvernement du peuple, par le peuple, pour le peuple ».

[18] Repris ultérieurement dans le texte sous l’abréviation A.G.

[19] Positivement ou négativement…

[20] Les Associés Coopérateurs infidèles « cocufient » leurs semblables. En réduisant la massification des achats ou des ventes, ils affaiblissent la structure, diminuent sa compétitivité et la rendent vulnérable face à son environnement concurrentiel.

[21] Autrement que par le versement du montant de leurs parts sociales.

[22] Au bénéfice d’une fiscalité avantageuse, liée à l’obligation pour les Coopératives de n’avoir d’activité qu’avec leurs associés Coopérateurs (une tolérance maximale de 20% de leur chiffre d’affaires réalisé avec des Tiers Non Associés est cependant fiscalisée).

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